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Titre du blog : Histoires yaoi
Auteur : histoiresyaoi
Date de création : 31-05-2013
 
posté le 05-07-2013 à 10:18:21

Pieveth, Chapitre 21

 

 

 

 

 

 

Jérémias passe la tête par l'embrasure de la porte, les faisant se séparer, et annonce :

 

- Elihus vous cherche, Sire.

- Bien. Dis-lui que je le rejoins à la bibliothèque.

- A vos ordres, Sire.

 

Une fois dans son bureau, Calith s'intéresse immédiatement aux dossiers en cours, laissant Iezahel se familiariser avec les lieux, comme si le moment qu'ils viennent d'échanger n'avait jamais existé. Elihus marque un temps d'arrêt, quand il entre, en voyant l'esclave présent. Et Calith, d'une voix sourde, lui martèle :

 

- Tes accusations étaient infondées et déplacées. Ne t'avise pas de refaire la même erreur. Iezahel est désormais à mon service, en tant que garde du corps, et ce, quoi que tu en penses. Ce n'est pas négociable ni sujet à discussion. Compris ?

- Oui. Et je m'excuse de l'avoir pensé coupable. Cette histoire me fait perdre mon bon sens.

- Assure-toi de le retrouver rapidement, j'ai besoin de toi.

- Bien sûr.

 

Elihus est embarrassé, c'est clairement visible. Mais Calith lui en veut trop pour le rassurer. Sans douceur, il lui demande :

 

- Tu voulais me voir ?

- Oui. On a pu établir une liste des esclaves correspondant au signalement. Mais ils sont nombreux et peu de personnes remarquent quand ils vont et viennent.

- Ça mérite d'être creusé. C'est l'une de nos seules pistes. Parles-en à Voinon, il pourra peut-être t'en apprendre davantage sur ceux qui sont suspects.

 

Calith se sent étrangement mal à l'aise, conscient de la présence de Iezahel dans son dos. Il évite d'employer certains mots, pour ne pas le blesser. Il se rend compte qu'il veut lui donner une bonne impression, en fait.

Mais très vite, Elihus l'entraîne dans les dossiers, et il en oublie la présence de son garde du corps. Submergé par une avalanche de chiffres, d'informations et de noms, Calith perd toute notion du temps et n'émerge qu'à l'heure du dîner.

 

 

 

 

Épuisé par la journée, il se rend dans ses appartements, escorté par ses deux gardes. Il prend un long bain brûlant qui décontracte ses muscles noués par des heures d'immobilité. Lorsqu'il en sort, le dîner est déjà monté, pour deux personnes comme il l'avait demandé. Il ordonne à Lanen et Jérémias d'aller dîner dans un réfectoire en espérant qu'ils trouvent un endroit un peu isolé pour passer un moment ensemble. Iezahel s'occupe spontanément du service, disposant les couverts sur la nappe, versant l'épais potage dans le bol de son souverain et lui servant du vin fortement coupé à l'eau. Calith constate avec plaisir que ses gestes sont plus sûr et bien moins maladroits. Puis l'esclave se sert et va s'asseoir en face de son roi. Enfin il lui souhaite un bon appétit avant de plonger sa cuillère dans son bol. Maintenant qu'il est nourri à sa faim, il prend son temps pour manger. Calith l'observe un moment, oubliant même son propre dîner. Et d'un coup, il lui demande :

 

- Tu n'as pas toujours été esclave, n'est-ce pas ? Ton langage et tes manières à table montrent que tu viens d'une famille aisée.

 

La cuillère s'est immobilisée à mi-chemin de la bouche de Iezahel, qui reste ouverte. Mais il se reprend vite et acquiesce :

 

- C'est vrai, je ne suis pas né esclave.

- Qu'est ce qu'il s'est passé alors ?

 

Iezahel plonge son regard dans celui du roi, une fraction de seconde, avant de s'intéresser à son bol de soupe. Le silence qui s'en suit fait douter Calith, à tel point qu'il lui dit d'une voix douce :

 

- Ce n'est pas un ordre. Rien ne t'oblige à en parler si tu le refuses.

- Je ne sais pas par où commencer.

 

Un sourire rassurant vient fleurir sur les lèvres du roi, qui lui murmure :

 

- Tu pourrais déjà me dire d'où tu viens.

- Du royaume de Fargues. Vous connaissez ?

- Bien sûr, nous avons des frontières communes. Même si la falaise nous empêche tout contact. Comment c'est, Fargues ?

- C'est très différent. Les deux royaumes sont côte à côte mais il fait bien plus chaud là-bas. La végétation est différente et les gens aussi. Ici, les loups-garous sont très bien acceptés, et même les autres créatures, même si elles se font bien plus discrètes.

 

Un silence pesant se dépose sur le salon. Iezahel fait lentement tourner sa cuillère dans le bol désormais vide, plongé dans ses souvenirs. Calith, lui, ne dit rien. Il veut le laisser s'exprimer, comme le souhaite. Et effectivement, d'une voix sourde, l'esclave poursuit :

 

- J'ai grandi dans une famille de la petite bourgeoisie, avec mes frères et sœurs. Mon père était un loup-garou et ma mère une humaine. Nous n'avons pas tous hérité de la lycanthropie paternelle, heureusement. Mais à Fargues, si les créatures surnaturelles sont relativement acceptées, certaines personnes n'acceptent pas qu'elles se mêlent aux humains. Et encore moins qu'elles fassent des enfants ensemble. Il paraît que ça souille la pureté du sang. Un soir, ils ont envahi notre petit manoir. Et...

 

Sa voix se brise, sous l'effet de l'émotion et un long frisson le parcourt. Calith se lève vivement et l'enjoint à faire de même. Ils s'installent alors devant la cheminée, assis sur deux fauteuils que Calith a rapproché l'un de l'autre. Et il lui assure :

 

- Si c'est trop difficile, n'en parle pas tout de suite.

- C'était il y a longtemps. J'avais pas quinze ans, à l'époque. Ils sont venus après la nuit tombée et ils ont mis à sac le manoir. Mon père a tenté de s'interposer. Ils s'y sont mis à cinq, mais ils ont réussi à le tuer. Après, ils s'en sont pris à ma mère et à mes soeurs. Et j'ai essayé de les protéger. J'ai tout fait pour les sauver. Mais ils étaient trop nombreux. Ils m'ont laissé pour mort au milieu des cadavres. Quand je suis revenu à moi, j'ai découvert mon petit frère mort dans son lit. Ils avaient pris soin de ne laisser aucun sang impur en vie. Sauf moi. Alors j'ai fui. J'ai erré dans les forêts et dans les campagnes. J'ai rencontré d'autres loups. On est devenu une meute et j'étais leur Alpha. Et la situation a dégénéré.

 

Il s'interrompt encore une fois, la gorge nouée. Calith passe un bras autour de ses épaules et lui répète qu'il peut s'arrêter à tout moment. Mais Iezahel est têtu. Il a commencé, il compte bien terminer :

 

- Nous étions de jeunes loups livrés à nous-même. Il y avait très souvent des combats dans la meute car tout le monde cherchait sa place. Mais nous ne nous mêlions pas aux humains. On avait tous eu des expériences plutôt difficiles et se ressourcer loin des hommes nous paraissait la meilleure solution. Mais la haine entre les peuples grandissait. Il y a eu des attaques, des deux côtés, et trop d'innocents tués. Tellement que certains humains ont monté des milices pour éradiquer la menace surnaturelle. Et nous, tout cachés que nous étions dans la forêt, nous étions leurs proies. La haine leur permettait toutes les audaces. Nos luttes intestines nous affaiblissaient. Quand ils nous ont attaqué, nous avons lutté. Et cette fois encore, ils étaient trop nombreux, trop bien préparés et nous, trop faibles. Ils en ont tué beaucoup. Les autres, ils les ont vendus à des esclavagistes. Nous n'étions pas humains, nous ne méritions pas de vivre comme eux. Ils nous ont marqué, comme du bétail, avec de l'argent, pour que notre corps ne puisse pas guérir cette brûlure et l'effacer. Un dragon qui prend son envol, nous désigne à vie comme la propriété de ce marchand d'hommes. Vous devez savoir que l'argent est mortel, pour les loups-garous ?

- Oui, bien sûr.

- L'argent des fers utilisés pour nous marquer a pénétré la peau et s'est infiltré dans notre sang. Du peu qu'il restait encore en vie, de ma meute, la plupart en sont morts.

 

Cette fois, le silence s'éternise. Alors Calith se lève, baille exagérément, et s'étire longuement. Et déclare, l'air de rien :

 

- Je suis épuisé. Tu me raconteras la suite plus tard, si tu le veux bien.

 

Un sourire triste effleure les lèvres de l'esclave, qui acquiesce d'un mouvement de la tête. Il se lève à son tour. Calith ne résiste pas longtemps et le serre dans ses bras, comme plus tôt dans la journée. Mais cette fois, l'esclave s'accroche de toutes ses forces et murmure, d'une voix à peine audible, un « merci » brûlant de reconnaissance.

Dans un dernier « merci », ils se séparent. Et Calith reprend, tant bien que mal, les choses en main :

 

- Tu dois dormir dans mes appartements, au cas où. Je te laisse choisir la banquette la plus appropriée. Je demanderai à Alima de la rendre plus confortable, demain matin. Bonne nuit.

- Merci Sire, bonne nuit à vous aussi.

 

Mais allongé dans son vaste lit, Calith ne dort pas. Les yeux grands ouverts fixés sur la tenture du baldaquin, il rumine la soirée. L'esclave n'aurait pas pu continuer son histoire, il aurait craqué avant la fin. Les larmes se seraient fatalement mises à couler. Autant lui épargner cette humiliation supplémentaire.

Dans l'obscurité totale de ses appartements, il perçoit le bruissement d'une couverture, le murmure d'un corps qui cherche vainement une position confortable. Pourvu que l'esclave n'ait pas remarqué ses efforts pour garder un air détaché au moment d'aller se coucher. Pourvu qu'il n'ait pas compris son envie violente de l'inviter dans son lit. Pas pour cabrioler avec lui, mais pour pouvoir le serrer encore dans ses bras, quelques heures de plus. Les soucis déserteraient-ils ses rêves, s'il dormait tout contre Iezahel ? Le silence est retombé, dans le salon. Immobile dans son lit, Calith cherche vainement le sommeil.

 

 

 

 

 

L'aube vient à peine de se lever qu'un terrible branle-bas de combat se déchaîne dans le salon royal. Encore peu réveillé, Calith quitte sa chambre pour voir Iezahel sur le pied de guerre, Elihus et Loundor faisant les cent pas autour de la table en s'invectivant à voix basse. Ils se figent en se rendant compte qu'ils ont réveillé leur roi. Puis Iezahel et Lanen s'empressent de lui préparer de l'eau pour ses ablutions, de disposer les vêtements de la journée sur le lit et de faire monter la collation matinale.

 

Vingt minutes plus tard, c'est un roi parfaitement réveillé et impeccablement habillé qui s'assoit en compagnie de ses conseillers devant le petit-déjeuner. Alors Loundor lui annonce :

 

- Comme tu peux t'en douter, nous avons un problème. Quand Elihus est rentré dans ton bureau, ce matin, pour s'avancer sur les dossiers à traiter, il a découvert ça.

 

Le général détache de sa ceinture et jette nonchalamment une bourse en cuir sur la table. Voyant que le roi reste perplexe, il poursuit :

 

- Il y a du sang séché à l'intérieur. Il ne s'agit pas de sang humain, mais animal. Évidemment, personne n'a vu d'intrus s'introduire dans la bibliothèque, les serviteurs et esclaves jurent qu'ils n'y sont pour rien et ils ne mentent pas.

- Tu penses que c'est à nouveau un message du tueur ?

- J'en suis convaincu.

- Mais pourquoi fait-il ça ?

 

Deux haussements d'épaules simultanés sont l'aveu de l'ignorance des conseillers. Elihus reprend :

 

- Il n'y avait aucun message, j'ai bien regardé de partout. Rien pour expliquer la présence de cet objet sur ton bureau. On en revient donc aux mêmes hypothèses que pour la corde : soit le tueur te menace, comme il a pu le faire avec ses autres victimes, soit il veut nous montrer que notre surveillance a des failles.

- Ce fils de chienne doit nous narguer ! « Vous surveillez les appartements ? Pas de problème, je m'introduis dans le bureau ! »

- La réplique sera la même : on l'arrête. L'enquête sur les esclaves avance ?

- La liste de Voinon, avec les esclaves correspondant à la description de la fille de Regargues, a été réduite à une vingtaine de personnes. Nous avons fait un tri, enlevant tous ceux qui avaient un alibi irréfutable. Suite aux évènements de ce matin, j'ai pris la liberté de les consigner dans leur dortoir. Je vais aller les interroger dès la fin du petit-déjeuner.

- Alors je t'accompagne Loundor. Je veux en avoir le cœur net.

 

La perspective de voir, peut-être, l'enquête aboutir enfin pousse Calith à terminer son repas rapidement. Et dans la foulée, il quitte ses appartements en compagnie du Général et de Iezahel.

 

 

 

 

 

La tension est palpable, dans l'immense salle jonchée de paillasses. Les suspects sont regroupés tous ensemble et assis en cercle, à même le sol. Les visage sont graves, les mines angoissées. Pas besoin d'être loup-garou pour savoir qu'ils sont terrorisés.

Iezahel reste en retrait mais ses yeux parcourent les lieux et les personnes présentes avec gravité. Loundor déplie la liste qu'il gardait dans une poche et appelle un premier asservi, qu'il entraîne dans un coin pour l'interroger en toute tranquillité.

 

Les interrogatoires sont longs : Loundor prend le temps de mettre les esclaves en confiance avant de rentrer dans le vif du sujet. Calith devine sans peine que le loup bouillonne intérieurement face à cette perte de temps. Mais il sait aussi que déceler un mensonge chez une personne terrorisée est loin d'être aisé. Et Loundor met toutes les chances de son côté.

 

L'après-midi est donc bien avancé quand ils quittent enfin les dortoirs pour aller prendre un repas dans les appartements royaux. Mais l'humeur n'est pas à la joie. Des vingt esclaves, que Calith connaît de vue pour les croiser parfois dans le château, aucun n'est coupable. Ils ont tous entendu parler des meurtres, évidemment, le contraire est impossible, mais ils ignorent tout du meurtrier, de ses motivations et de ses agissements. Loundor leur a également demandé si quelqu'un leur avait ordonné d'emmener une bourse hors du château. Ce serait un excellent moyen, pour l'assassin, de se débarrasser de ces parties sans se mouiller personnellement. Sauf que personne n'a jamais reçu un tel ordre. C'est à devenir fou.

 

En désespoir de cause, Loundor a demandé à ce que la liste soit corrigée et élargie : le coupable est passé entre les mailles du filet. Et surtout, il conseille à Calith :

 

- Va t'entraîner. Le tueur sait ce que nous faisons, connait nos décisions. Je refuse de lui laisser voir que nous nous acharnons à trouver des indices. Va t'entraîner comme si de rien n'était.

- Tu as raison. Je ne veux pas lui donner la moindre satisfaction.

 

C'est avec son esclave qu'il s'entraîne, Calith, un peu inquiet à l'idée que les soldats l'interrogent sur l'enquête en cours. Et puis, surtout, c'est pour le plaisir de passer du temps avec Iezahel. D'admirer ses muscles puissants qui roulent sous la peau. De deviner, petit à petit, la sueur perler sur son front. De s'émerveiller de la souplesse de son corps, de la vivacité de ses mouvements, de la puissance de ses frappes. Il est doué, c'est une certitude. Certes, il n'a pas passé sa jeunesse à apprendre le maniement des armes, mais il compense par la rapidité et la puissance de son loup.

 

La nuit tombe tôt, à cette période de l'année, aussi doivent-ils s'arrêter lorsque l'obscurité devient gênante. Mais ils sont en nage et largement essoufflés. Sans faire plus de façon, Calith va se laver avec l'esclave, dans la salle prévue pour les soldats.

 

Ce sont deux hommes affamés qui remontent en quatrième vitesse dans les appartements royaux pour dîner. L'ambiance n'est pas réellement aux confessions et Iezahel ne semble pas avoir envie de reparler de son passé. Et Calith, lui, ne veut surtout pas le forcer. Et puis, il a beaucoup d'autres choses à penser. Le repas se déroule donc dans un silence religieux, uniquement troublé par le bruit des couverts.

Lorsque vient l'heure d'aller se coucher, Calith se résigne à passer la nuit seul, à écouter Iezahel bouger dans son sommeil. Mais l'esclave le prend de court en disant, d'une voix qui se veut assurée :

 

- Sire. Je dois veiller sur vous et je pense que je serais plus efficace si je dormais dans votre chambre.

 

Calith était en train de se relever de table. Il s'immobilise à mi-chemin, la bouche entrouverte, les yeux écarquillés. Et aussitôt, Iezahel se recule, les mains en l'air. Il a perdu toute l'assurance qu'il affichait. Il balbutie :

 

- C'est … c'est pour votre protection, Sire... Je.. Je ne veux pas que vous soyez tué quand je dors dans la pièce d'à côté.

- Mais il n'y a que mon lit, pour dormir, dans la chambre.

- Je peux dormir par terre, Sire.

 

Calith se redresse, quittant sa posture, les fesses en arrière, fort peu royale, et sonde le regard de Iezahel. A-t-il seulement conscience de ce qu'il propose ? Ce « peux » implique-t-il qu'il souhaite dormir dans son lit ?

C'est le simplet, qui est de retour. Tassé sur lui-même, la tête basse et le regard rivé au sol, il passe d'un pied sur l'autre. Et Calith réalise qu'il serait incapable de fermer l'oeil de la nuit avec son esclave roulé en boule au pied du lit, comme un chien. Mais il se souvient parfaitement des paroles de Loundor, il sait que Iezahel prend sa mission très au sérieux. S'il lui refuse cette demande, ce serait alors l'esclave qui ne dormirait pas de la nuit. Il prend une grande inspiration et laisse échapper dans un souffle :

 

- D'accord. Et tu peux amener une banquette dans la chambre, si tu le souhaites.

 

Voyant l'asservi se diriger vers une banquette sans rien ajouter, Calith regagne sa chambre. C'est sans doute le meilleur compromis qu'il était possible de trouver. Il se glisse dans les draps et rabat l'épais édredon sur lui quand Iezahel revient, les mains vides. Et murmure, d'une voix à peine audible :

 

- Je vous dégoûte, Sire ?

- Pardon ?

 

La perplexité du roi n'est pas feinte : il ne comprend pas pourquoi il lui demande ça. Mais sa question déclenche une vague de nervosité. Et pourtant, Iezahel répète :

 

- Je vous dégoûte, maintenant que vous savez ce que Tathyn m'a fait ?

- Mais non voyons ! Certainement pas !

 

Mais si l'esclave semble légèrement soulagé par ce cri du cœur, il n'en garde pas moins sa nervosité. Et Calith, lui, a peur des faux espoirs et d'un malentendu. Il demande pourtant d'une voix rauque :

 

- Tu veux dormir avec moi ?

 

Il ne répond rien, le guerrier timoré qui se dandine sur le seuil de la porte. Mais il s'avance, contourne le lit, et se glisse sous l'édredon. Et alors que le roi essaie de garder le plus de distance entre eux deux, fort de sa résolution de ne plus toucher cet esclave qui a tant souffert et qui ne conçoit pas de relations entre hommes, Iezahel se rapproche. Comme un papillon de nuit attiré par une chandelle, il se rapproche jusqu'à venir se lover tout contre son roi. Et le roi, la gorge nouée, le serre dans ses bras, l'entoure de son corps, se repaît de sa chaleur. Il respire à plein poumons le doux parfum, subtil mélange de savon et de forêt, qui envahit peu à peu le lit. Et il comprend que sa sécurité n'était que prétexte pour une nuit de tendresse et d'affection. Mais il n'en dit rien, bien sûr. Il se tait et savoure.